September 30, 2025

Avec l'aimable autorisation de la famille de M. Aishan.
Genève, le 30 septembre 2025 – Nous, MENA Rights Group (MRG) et Safeguard Defenders, saluons la décision du Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire («GTDA» ou « Groupe de travail »), qui a jugé que la détention de l’activiste ouïghour Yidiresi Aishan au Maroc, où il risquait d'être extradé vers la Chine, était arbitraire au regard du droit international.
« Bien qu’Aishan soit désormais en sécurité et ne risque plus d'être extradé, nous nous réjouissons que le GTDA ait enfin reconnu comme arbitraire sa détention qui a duré trois ans et sept mois », ont déclaré les deux organisations.
Yidiresi Aishan, également connu sous le nom d’Idris Hassan, a été arrêté en juillet 2021 à son arrivée au Maroc sur un vol en provenance de Turquie, où il vivait avec sa famille depuis 2012, sur la base d'une notice rouge émise par Interpol à la demande de la Chine « pour appartenance à une organisation terroriste ».
Peu après son arrestation, Interpol a retiré la notice rouge, au motif qu’elle était jugée contraire à sa Constitution, laquelle prévoit expressément que l’Organisation ne doit entreprendre aucune activité de caractère politique, militaire, religieux ou racial. Ces dernières années, la Chine a de plus en plus recours au système de notices rouges d'Interpol pour réprimer la dissidence pacifique.
Craignant qu’il ne soit exposé à un risque sérieux de torture s'il était extradé vers la Chine, MRG et Safeguard Defenders ont soumis une demande de mesures provisoires au Comité des Nations unies contre la torture (CAT) en décembre 2021, invoquant une possible violation du principe de non-refoulement par le Maroc.
Bien que les autorités marocaines aient accédé à la demande du CAT et se soient abstenues de procéder à son extradition, Aishan est resté détenu à la prison de Tiflet dans l’attente d’une décision. En juillet 2024, le Comité a rendu sa décision, appelant le Maroc à ne pas l’extrader et à le libérer en l'absence de charges. Aishan a finalement été libéré le 12 février 2025.
« Le cas d'Aishan n’est pas un cas isolé », ont noté MRG et Safeguard Defenders. « Dans une autre affaire, le gouvernement marocain a reconnu l'absence de dispositions légales permettant la libération des personnes en attente d'une décision du Comité. Dans la pratique, cela signifie que des personnes peuvent rester emprisonnées pendant des années en attendant qu'un organe des Nations unies se prononce sur leur cas. »
Dans son avis, le GTDA a estimé que le Maroc n’avait établi aucune base juridique justifiant le maintien en détention d'Aishan après l'annulation de la notice rouge d'Interpol. En conséquence, le Maroc a été jugé coupable d'avoir violé l'article 9 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui consacrent tous deux le droit à la liberté et à la sécurité de la personne et interdisent les arrestations ou détentions arbitraires. Le GTDA a également déploré l'impossibilité pour Aishan de consulter un avocat pendant sa garde à vue.
Le Groupe de travail a demandé au Maroc d'accorder à Aishan un droit exécutoire à réparation, y compris une indemnisation pour le préjudice subi. Faisant écho à la recommandation du Groupe de travail visant à revoir la législation et sa pratique, nous exhortons les autorités marocaines à revoir leur législation nationale afin de garantir l’existence de mesures alternatives à la détention pour les personnes faisant l'objet d'une demande d'extradition dans les cas où une mesure provisoire a été prononcée par un organe conventionnel des Nations unies.