Un avocat algérien de défense des droits humains risque une peine de prison pour un post Facebook

Un avocat algérien de défense des droits humains risque une peine de prison pour un post Facebook

Omar Boussag est membre du collectif de défense des détenus du Hirak et d'une section locale de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme, aujourd'hui dissoute. Il est actuellement poursuivi pour « outrage à corps constitué » et « incitation à un attroupement non armé », en vertu des articles 100 et 146 du Code pénal, pour avoir publié le 7 mai 2021 sur Facebook un message relatif à un mouvement social. Le 26 février 2024, Boussag a été condamné par contumace à six mois de prison.

Omar Boussag est défenseur des droits de l'homme et avocat au barreau d'Oran depuis 2015. Il est également membre de la Ligue algérienne pour la défense des droits humains (LADDH), aujourd'hui dissoute, depuis 2010 et a rejoint le bureau national de l'organisation en 2013. Il est également membre du Collectif de défense des détenus d'opinion depuis 2019 et membre actif du parti politique du Front des forces socialistes (FFS).

Boussag assure actuellement la défense juridique de nombreux prisonniers d'opinion dans différentes wilayas d'Algérie. Il a été particulièrement sollicité lors de la répression du mouvement Hirak.

Le vendredi 26 février 2021, lors d'une manifestation du Hirak à Oran, les manifestants ont été violemment réprimés par les forces antiémeutes de la sûreté de wilaya d’Oran. Boussag, avocat au barreau d’Oran, a tenté de protéger les manifestants aux côtés de ses confrères, en soulignant le caractère pacifique de la manifestation. Cependant, il a été violemment battu et réprimé par la police, subissant plusieurs blessures.

Le 15 mars 2021, Boussag a déposé une plainte auprès du tribunal d’Oran contre la police de la wilaya d'Oran. Cette action fait suite à la violente répression et aux agressions physiques dont il a été victime de la part des forces de l'ordre. Dans sa plainte, Boussag a souligné les graves abus commis par les forces de sécurité, malgré le caractère pacifique de la manifestation à Oran. Il a fermement dénoncé les violations des droits de l'homme et les atteintes à l'intégrité physique des manifestants, soulignant que son intervention visait uniquement à protéger les droits des citoyens et à assurer le respect de la loi.

Le 22 décembre 2021, huit mois après le dépôt de la plainte, le service de lutte contre la cybercriminalité de la police judiciaire d’Oran a ouvert une enquête à son encontre. L'enquête s'est penchée sur un post de la page Facebook de Boussag datant du 7 mai 2021, dans lequel il explore la possibilité que l'extension d'un mouvement social de la protection civile aux organes de sécurité tels que la police et la gendarmerie puisse conduire à la fin du système. Au début du mois, des centaines de membres de la protection civile s'étaient rassemblés pour réclamer une amélioration de leurs conditions de travail avant que leur mouvement ne soit réprimé.

Le 13 juin 2022, le procureur de la République près le tribunal d’Essania a transmis le dossier au juge d'instruction en demandant l'ouverture d'une information judiciaire contre Boussag pour les délits d' « incitation à un attroupement non armé » et d' « outrage à corps constitué » en application des articles 100.1 et 146 du Code pénal algérien.

Le 15 juin 2022, Boussag s'est vu notifier les charges retenues contre lui. Il a rapidement informé l'Ordre des Avocats d'Oran et les membres du Conseil de l'Ordre des Avocats d'Oran de cette grave violation de ses devoirs professionnels. Cette situation met en évidence un manquement important au devoir d'assistance et de protection de l'avocat dans l'exercice de ses fonctions.

Le 31 mai 2023, Boussag comparaît pour la première fois devant le juge d'instruction du tribunal d'Essanie. Lors de cette audience, il a rejeté les accusations portées contre lui et assume la responsabilité de ses déclarations sur les médias sociaux, qui sont à la base des accusations.

Le 20 septembre 2023, l'affaire a été transférée au tribunal pénal, qui a confirmé les charges retenues contre Boussag.

Le 26 février 2024, le procès de Boussag s’est déroulé en son absence. Le procureur de la République a requis un an d’emprisonnement et une amende de 50 000 dinars algériens. Après examen du dossier, le juge a décidé de condamner Boussag par contumace à six mois d'emprisonnement et à une amende de 500 000 dinars algériens.

En raison de son absence lors du procès, Boussag a fait opposition au jugement de première instance. Sa demande a été acceptée. Il a été rejugé le 8 juillet 2024. Lors de cette audience, le procureur a requis trois mois de prison ferme. Le verdict est attendu pour le 15 juillet 2024.

Affirmant que les poursuites engagées contre Boussag contreviennent à son droit à la liberté d'expression tel que reconnu par l'article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), ratifié par l'Algérie, MENA Rights Group a soumis un appel urgent à plusieurs titulaires de mandats de procédures spéciales, dont le Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats, le 4 juillet 2024.

Timeline

Le 4 juillet 2024 : MENA Rights Group envoie un appel urgent à plusieurs titulaires de mandats de procédures spéciales de l'ONU concernant la situation d’Omar Boussag.
26 février 2024 : Le tribunal d’Essania condamne Boussag à six mois de prison par contumace.
13 juin 2022 : Omar Boussag est inculpé pour « incitation à un attroupement non armé » et « outrage à corps constitué ».
7 mai 2021 : Boussag publie un message sur Facebook à propos d'un rassemblement pacifique du personnel de la protection civile.