Le ressortissant saoudien Hassan al-Rabea risque d'être extradé du Maroc vers l'Arabie saoudite

Le ressortissant saoudien Hassan al-Rabea risque d'être extradé du Maroc vers l'Arabie saoudite

Hassan Muhammad al-Rabea est un ressortissant saoudien issu de la minorité chiite, dont la famille a une longue histoire de persécution, plusieurs de ses proches ayant été exécutés ou se trouvant dans le couloir de la mort. Le 14 janvier 2023, il a été arrêté à l'aéroport de Marrakech sur la base d'un mandat d'arrêt diffusé par le Conseil des ministres de l'Intérieur arabes. Il est actuellement détenu à la prison de Tiflet 2, dans l’attente de son extradition. Le 1er février 2023, al-Rabea a eu sa première et unique audience devant la Cour de cassation de Rabat, qui a statué en faveur de son extradition.

Hassan Muhammad al-Rabea est un ressortissant saoudien qui appartient à la minorité chiite du pays. Sa famille a une longue histoire de persécution en Arabie saoudite, plusieurs de ses proches ayant été exécutés ou se trouvant dans le couloir de la mort.

Son cousin Ali Hassan al-Rabie a été condamné à mort en juillet 2019 avant que sa condamnation ne soit convertie en une peine de 25 ans de prison par le tribunal pénal spécialisé le 16 novembre 2021. Le frère d'Al-Rabea, Ali Mohammed al-Rabie, a été condamné à mort le 5 novembre 2022, prétendument pour avoir aidé son frère, Monier al-Rabie, à fuir l'Arabie saoudite.

Monier al-Rabie était recherché par les autorités saoudiennes pour sa participation à des manifestations qui ont eu lieu dans la ville d’al-Awamiyah, dans l'est du pays, en 2011. Deux des cousins d’al-Rabie, Hussain et Ahmed al-Rabie, ont été exécutés le 12 mars 2022. Ce jour-là, 81 personnes ont été exécutées pour des accusations de terrorisme. Parmi elles, 41 personnes appartenaient à la minorité chiite et avaient pris part à des manifestations antigouvernementales en 2011-2012.

D'après les informations transmises à plusieurs titulaires de mandat au titre des procédures spéciales des Nations unies, la quasi-totalité de ces 81 hommes a été déclarée coupable, condamnée et exécutée dans le plus grand secret ; leurs proches n'ont pas été informés ni prévenus de l'imminence des exécutions ni des circonstances de celles-ci. 

Craignant d'être lui-même persécuté, al-Rabea a quitté l'Arabie saoudite au début de l’année 2022. Après avoir voyagé dans diverses régions du monde, il est arrivé au Maroc le 22 juin 2022. Après un séjour de cinq mois au Maroc, le 14 janvier 2023, al-Rabea a été arrêté à l'aéroport de Marrakech alors qu'il tentait de monter dans un avion en direction de la Turquie. L'arrestation a été effectuée sur la base d'un mandat d'arrêt provisoire diffusé par le Conseil des ministres de l'Intérieur arabes le 22 novembre 2022. 

Le document fait référence à un mandat d'arrêt émis par le ministère public saoudien le 19 octobre 2022, selon lequel al-Rabea est soupçonné de « collaboration avec des terroristes en les amenant à se mettre d'accord et à collaborer avec lui pour le faire sortir d'Arabie saoudite de manière irrégulière ». De tels actes, selon le mandat d'arrêt, relèvent de l’article 38 de la loi de 2017 sur la lutte contre les crimes terroristes et leur financement, qui prévoit une peine de prison de 10 à 20 ans.

Le 14 janvier 2023, al-Rabea a été présenté devant le procureur du Roi près le tribunal de première instance de Marrakech. Bien qu'al-Rabea ait déclaré qu'il refusait d'être extradé, le procureur a ordonné qu'il soit placé en détention provisoire à la prison de Tiflet 2, dans l'attente d'une décision de la Cour de cassation, juridiction chargée d'émettre un avis sur les demandes d'extradition. 

À la lumière de l'extradition abusive d’un autre ressortissant saoudien, Osama al-Hasani, le 13 mars 2021, et des risques fondés de torture auxquels al-Rabie serait confronté s'il était extradé vers son pays d'origine, MENA Rights Group a demandé l'intervention urgente de la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la torture, invoquant une possible violation du principe de non-refoulement par le Maroc.

Le 1er février 2023, al-Rabea a été présenté pour la première fois devant la Cour de cassation de Rabat, qui a entendu son cas. Le même jour, la Cour s'est prononcée en faveur de son extradition. La Cour de cassation a rejeté la demande de libération d'al-Rabea et a rendu un avis favorable à son extradition vers l'Arabie saoudite.

Le 6 février 2023, le Comité a demandé au Maroc de prendre des mesures provisoires en suspendant l'extradition d’al-Rabea en attendant l'examen de son cas.

Le 7 février 2023, cinq titulaires de mandat au titre des procédures spéciales des Nations unies, dont le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ont exprimé leur inquiétude face à la décision du Maroc d'extrader al-Rabea vers l'Arabie saoudite. Ils ont notamment souligné qu'il risquait d'être soumis à la torture et de subir un procès inéquitable, voire d'être condamné à mort.

Timeline

7 février 2023 : Cinq titulaires de mandat au titre des procédures spéciales de l'ONU expriment leur inquiétude concernant l'extradition d'al-Rabea vers l'Arabie saoudite.
6 février 2023 : Le Comité contre la torture adresse une demande de mesures provisoires au Maroc, enjoignant les autorités de ne pas extrader al-Rabea pendant que sa requête est en cours d’examen par le Comité.
2 février 2023: MENA Rights Group soumet le cas d'al-Rabea au Comité des Nations Unies contre la torture, en demandant instamment au Comité de demander des mesures de protection provisoires au Maroc.
1er février 2023 : al-Rabea a eu sa première et unique audience devant la Cour de cassation de Rabat. La Cour refuse de libérer al-Rabea et rend un avis favorable à son extradition vers l'Arabie saoudite.
18 janvier 2023: MENA Rights group sollicite l’intervention urgente de la Rapporteuse spéciale contre la torture.
14 janvier 2023 : al-Rabea est arrêté à l’aéroport de Marrakech et présenté devant le procureur du tribunal de première instance de Marrakech, qui ordonne sa mise en détention provisoire à la prison de Tiflet 2.
22 novembre 2022 : le Conseil des ministres de l'Intérieur arabes fait circuler une demande d’arrestation provisoire contre al-Rabea à la demande de l'Arabie saoudite.
19 octobre 2022 : le ministère public saoudien lance un mandat d'arrêt contre al-Rabea, invoquant une violation de la loi antiterroriste de 2017.
22 juin 2022 : arrivée d'Al-Rabea au Maroc.